QUELS BOIS POUR LES INSTRUMENTS À VENT ?

Partie II : les bois 

Introduction

Après un premier article sur les matériaux utilisés dans la fabrication des instruments de la famille des cuivres, des saxophones et des flûtes, intéressons-nous maintenant à la famille des bois, les clarinettes, hautbois et bassons.

Les matériaux utilisés ont varié au fil du temps avec l’évolution du mécanisme de ces instruments. Plus de trous, plus de mécanismes ont nécessité des bois plus durs, plus résistants afin que ceux-ci ne se fendent pas et résistent aux chocs. C’est ainsi qu’est apparu l’ébène au XIXème siècle suivi d’autres matériaux au XXe siècle tels que le cocobolo, le bois de violette, la grenadille ainsi que les matériaux de synthèse (bakélite, résine…)..

Depuis 2016, lors du CITES, des normes très restrictives sur l’importation et l’exportation des bois tropicaux ont été imposées aux facteurs d’instruments de musique afin de protéger ces espèces. Même si ces normes se sont assouplies en 2019, elles incitent les luthiers à chercher et développer de nouveaux matériaux.

Qu’en est-il aujourd’hui ?

Avec le marketing, le terme ébène ou grenadille regroupe beaucoup d’essences et il est difficile d’y voir clair pour connaître réellement le bois utilisé pour son instrument.

L’ébène

L'ébène n’est pas un arbre, une plante ou un bois en soi. Il peut être produit par plusieurs arbres appartenant au genre Diospyros, appelés à défaut ébéniers. De ces arbres, c’est le cœur du tronc, le « Duramen » aux caractéristiques très particulières (couleur très sombre et densité très élevée), qui est utilisé et que l’on nomme « ébène ».

Les Diospyros se trouvent dans les régions tropicales. Ils prennent alors commercialement les noms d’ébène d’Inde, ébène d’Afrique, ébène de Madagascar, etc.

 

Attention !

« l’ébène du Mozambique » est le nom commercial de « la grenadille d’Afrique ». Or, seuls les bois issus des Diospyros au duramen noir (ou approchant le noir) peuvent prendre l'appellation d'ébène.

Le Palissandre et la Grenadille

Comme pour l’ébène, le palissandre et la grenadille ne sont pas des variétés d’arbres en soi. Il s’agit là aussi du cœur du bois issu des arbres appartenant au genre Dalbergia. De caractéristiques très proches de l’ébène, mais aux couleurs plus claires et bois plus veinés, le palissandre et la grenadille n’en ont pas sa noblesse. Nous pouvons considérer la grenadille comme une variété de palissandre.

Parmi le genre Dalbergia, on retrouve les appellations commerciales suivantes :

 

Nom commercial

Nom scientifique

Région

Aspect

Palissandre de Rio

Dalbergia nigra 

Brésil

Grenadille d’Afrique (ou ébène du Mozambique)

Dalbergia Melanoxylon

Afrique

Palissandre indien (ou blackwood d'Inde)

Dalbergia latifolia 

Inde

Bois de rose malgache

Dalbergia maritima 

Madagascar

Bois de rose indien

Dalbergia sisso 

Inde

Bois de violette ou Jacaranda (ou Kingwood)

Dalbergia cearensis 

Brésil

Cocobolo

Dalbergia retusa

Amérique centrale

 

Le palissandre, de part sa densité plus faible que la grenadille, est une essence intéressante  pour la fabrication des gros instruments « bois » tels que le fagot ou le basson. Nous obtenons ainsi des instruments plus légers avec tout de même des caractéristiques acoustiques et mécaniques de grande qualité.

Le « Dalbergia Melanoxylon »

Le Dalbergia melanoxylon est un arbre qui pousse en Afrique tropicale et, plus précisément, au Mozambique. D’où son appellation grenadille du Mozambique. On le retrouve aussi sous les appellations suivantes : Grenadille d'Afrique, Banbanus, M'pingo, Pau Preto, Poyi,…

Ses caractéristiques, couleur et densité très proches du Diospyros, lui ont aussi valu l’appellation abusive d'ébène du Mozambique.

 

Pratiquement insensible à l’humidité ambiante, c'est le bois idéal pour la facture des clarinettes pour éviter la fissuration, couramment observée pour l'ébène.

 

L’inconvénient de ce bois est qu’il se vend à des prix très élevés sur le marché du bois.

Certaines clarinettes, vendues avec l’appellation « grenadille », ne sont pas du Dalbergia melanoxylon mais une ébénacée souvent poreuse. Derrière le terme générique « grenadille », des essences moins nobles sont utilisées. C'est moins dense, plus poreux et donc moins onéreux. Ce qui est de mauvaise augure pour la fiabilité d'un instrument.

 L'utilisation du nom vulgarisé de "grenadille" cache parfois de mauvaises surprises.

Les matériaux d’avenir

Le Mopane ou Mopani

C’est un arbre qui pousse essentiellement en Afrique australe. Il fait partie du genre Colophospermum. Sa densité dépasse souvent celle du véritable ébène et il est moins cassant aux contraintes mécaniques que ce dernier. Ses qualités acoustiques sont aussi remarquables. Il procure un son doux et chaleureux.

Espèce beaucoup moins rare que les Diospyros ou que le Dalbergia Melanoxylon, il est également moins cher.

Pour toutes les raisons citées précédemment, le mopane pourrait être le matériau naturel d’avenir dans la fabrication des clarinettes et hautbois. D’ailleurs, en 2021, Buffet Crampon a sorti sa gamme de clarinettes Tosca en mopane en édition limitée.

En Conclusion

  • Les clarinettes dites en ébène sont généralement en grenadille du type Dalbergia melanoxylon.
  • Les clarinettes dites en grenadille ne sont pas forcément du type Dalbergia melanoxylon.
  • Les clarinettes en grenadille à bas prix sont généralement en blackwood d’Inde.
  • Pour le moment, pas de confusion sur le mopane.

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